Tous au SMIC !
La messe est dite.
Devant un parterre de députés, censés représenter le peuple. Sous les applaudissements soumis, achetés à coups de sous-ministres et de chantage à la dissolution, de députés réputés « de gauche ». Sous les cris d’orfraie d’une droite qui trouve dans les gesticulations le seul moyen d’opposition tant la politique détaillée à la tribune est celle qu’elle n’a jamais osé faire.
Manuel Valls, l’iconoclaste, le briseur de tabous en série, nous a donc donné à boire la soupe néolibérale quotidienne que nous déglutissons jusqu’à l’overdose depuis 22 mois. Coups de menton en sus. Dans la formulation, il n’y va pas de main morte, Manuel :
Zéro charges pour l’employeur d’un salarié payé au SMIC.
Voilà une vraie révolution.
La RÉ-VO-LU-TION. C’est un peu douloureux pour le fondement de lire une chose pareille quand elle est étiquetée « socialiste ». Alors que Pascal Lamy proposait, il y a quelques jours, de briser le tabou du SMIC (celui-là même qui voulait s’augmenter de 32 % il y quelques années), Manuel nous fait une nouvelle proposition toute aussi alléchante : tous au SMIC ! (sauf les chômeurs bien entendu).
En supprimant les cotisations sociales sur les plus bas salaires, l’ex premier flic de France envoie un signal clair au patronat : embauchez-donc au SMIC, ça ne vous coûtera presque plus rien. Et ce faisant, tout en tarissant les sources de financement des prestations sociales (faut-il rappeler qu’il s’agit de salaire différé ?), il crée un « écart de compétitivité » entre les salariés payés au SMIC et ceux qui sont juste au-dessus. Le gouvernement encourage ainsi la déflation salariale.
Elle était en germe dans l’ANI qui permet la mise en place des accords compétitivité-emploi (dont Sarkozy rêvait dans ses délires les plus moites). Ces accords mettent la réduction des salaires et l’augmentation du temps de travail (donc la baisse du salaire horaire) au centre des solutions pour lutter contre la crise.
Parce que le coût du travail, tu comprends, c’est très important :
D’abord, il y a le coût du travail.
Il doit baisser. C’est un des leviers de la compétitivité – pas le seul – mais il pèse lourd.
Il s’agit de produire au plus bas coût pour être compétitif (en priant pour que la croissance arrive). Cette logique entraînera inexorablement les entreprises dans une course aux bas salaires. Dans un jeu où il ne peut y avoir que des perdants : des économies entières dans le cas des pays « moins compétitifs » et une grande masse des salariés dans les pays qui ont « réussi à relever le défi de la compétitivité ». Pire que néfaste, elle prend le concept intrinsèquement libéral de compétitivité par le plus petit et vicieux bout de la lorgnette : la compétitivité prix. (Comme le gouvernement recycle les vieilles antiennes libérales, je me permets de recycler mes vieux billets et de te renvoyer ici sur la compétitivité).
La « compétitivité » nous entraîne dans le cercle vicieux de la dégradation des conditions de travail, des prestations sociales, des conditions de rémunérations. Mais un jour, c’est sûr, la croissance reviendra et notre balance commerciale sera positive.
En attendant, comme le Medef applaudit, on est content :
Le MEDEF note avec satisfaction que le premier ministre a mis la compétitivité des entreprises au cœur de la stratégie économique du gouvernement.
Le MEDEF salue aussi positivement l’ambition affichée sur la baisse des dépenses publiques, la volonté de réformer l’organisation territoriale des collectivités et la poursuite de la baisse du coût du travail.
La messe est dite.
Amen.
Nan mais il a pas dit aussi que le SMIC était augmenté de 20 % ? Non ? #RunningGag
Tout ceci nous prépare (malgré nous) à un effondrement inévitable. Mais nous ne nous laisserons pas faire ! #12avril #25mai
Comme j’aimerais que tous ceux qui se gargarisent des termes « compétitivité », « flexibilité », « coût du travail », mais plus encore que tous ceux, simples citoyens, qui les écoutent en se disant « ah ben oui, il a raison », prennent connaissance de ce que cela signifie concrètement , car lorsqu’il s’agit de nous précariser leur créativité est sans limites :
http://www.bastamag.net/Comment-Ipsos-fait-travailler-a
Et voici que cette conclusion « la messe est dite » s’avère encore plus prémonitoire dans le pire :
Gattaz réclame à présent la baisse du même SMIC dont il était question ici :
Ils ne s’arrêteront décidément pas de nous enfoncer si NOUS ne nous décidons pas à les arrêter !!!!