Babordages

Pendant qu'ils ne cherchaient pas d'alternative, nous pensions à un #PlanB.

T’étais où, Charlie ?

Publié le par dans avec 5 avis

L’esprit du 11 janvier

Le 11 janvier, tu étais dans la rue pour scander « Je suis Charlie » et marquer ton refus de la barbarie et ton soutien indéfectible à la liberté de conscience, au droit au blasphème (ou au saucisson, c’est pas clair), toi et tellement de millions de tes semblables que syndicats et police ont renoncé de concert à leur bataille de chiffres coutumière.

Le gouvernement et l’Assemblée ont ensuite décidé de la mettre bien profond aux terroristes en votant la loi Renseignement légalisant la surveillance généralisée de la population française, sans passer par un juge, avec aucun moyen de savoir si tu es surveillé, si des caméras ont été posées chez toi, et donc aucune voie de recours en cas d’abus ou d’erreur (Tuttle ? Buttle ?).

Devant l’Assemblée, la veille ou le jour du vote, quelques centaines de personnes s’étaient rassemblées pour protester. Je sais, j’y étais.

T’étais où, Charlie ?

 
Fast forward quelques mois. Je ne sais pas toi, mais moi, j’avais bloqué mon dimanche 29 novembre pour aller rejoindre la grande marche pour le climat, une initiative mondiale pour foutre un peu la pression aux représentants du complexe militaro-industriel qui nous gouvernent. Selon certaines estimations, 1 million de manifestants du monde entier étaient attendus rien qu’à Paris.

Patatras, le carnage du vendredi 13.

Le gouvernement a immédiatement décidé de la mettre bien profond aux terroristes en proclamant l’état d’urgence qui court-circuite les mécanismes qui protègent nos libertés fondamentales auxquelles les terroristes voulaient justement s’attaquer. #Genius. N’écoutant que son courage, l’AN (moins 6 suppôts du jihadisme) a ensuite voté son prolongement pour trois mois (et #ElPequeñoManuelFranco a confirmé hier matin qu’il pourrait être reconduit ad vitam…)

Dans la foulée, c’est donc pour ta sécurité — et pour ne pas détourner nos valeureuses forces de l’ordre de leur impitoyable traque des écologistes terroristes (que la surveillance généralisée avait mystérieusement laissée filer entre les mailles de son filet) — que le gouvernement a décidé d’interdire la marche du 29 novembre. (Heureusement, il ne t’a pas interdit d’aller sauter dans des centres commerciaux bondés, mais c’est une autre histoire).

Interdiction inacceptable, infantilisante, pour certains romantiques has-been qui conservent un attachement risible à d’antiques valeurs humanistes fondamentales, et qui ont donc lancé des appels à braver l’interdiction et aller manifester quand même.

Comme j’avais bloqué mon dimanche et que je suis un peu vieux jeu, j’ai décidé de m’y rendre, tout comme quelques centaines de personnes : des #Lordon, des gauchistes, des anars, des Indiens d’Amérique du Sud, des vegans, des marionnettistes, des clowns, des mamans et des enfants, des touristes venus prendre des selfies devant le mémorial aux victimes et ceux qui essayaient de leur vendre des drapeaux français, quelques jeunes cagoulés prêts à en découdre, et presque autant de robocops que tous les suscités. Je sais, j’y étais.

T’étais où, Charlie ?

Tu étais en terrasse ?

Tu sais que tu n’aurais pas été de trop pour protéger le mémorial des rangers des CRS ?

 

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À propos de sknob

Franglophone songwriter, cartoonist, translator, geek, #ronchonchon. VieuxSage, déjà blogueur au XXe siècle, je ne supporte ni l'injustice, ni la mauvaise foi, ni les gens qui réfléchissent avec le cerveau d’autrui, ni les betteraves. En revanche, j'ai un peu le melon depuis que j'ai publié un billet sur le blog de Paul Jorion. Mes camarades m'ont à l'œil.

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5 avis sur “T’étais où, Charlie ?

  1. André ROUGIER

    Je ne suis pas Charlie, ne l’ai jamais été (bien qu’il me soit arrivé de blasphémer, et que j’adore le saucisson!) Place de la République, on y a vu les mêmes choses que vous: des gens sereins, graves ou rieurs, venus pour le climat, contre l’état d’urgence (ou même en souvenir de Rémi)
    Par contre, on a aussi vu des choses qui apparemment vous ont échappé: les « voltigeurs », flics en civil infiltrés et rompus au tactique de provoc’ (on les connais depuis les années’60, ce sont généralement des gens des anciens RG) qui ont les premiers jeté des projectiles (y compris pris sur le mémorial), suivis de quelques groupes des « black blocs », cagoulés, arrivés avec une déconcertante facilité sur les lieux et fort peu visés par les flics, lesquels se sont contentés du « minimum syndical » contre eux (rien d’étonnant, puisqu’ils servaient leurs intérêts, dans le rôle d’alliés objectifs et idiots utiles de ceux qu’ils prétendent combattre) Je milite et je suis sur le pavé depuis 1966 environ, je ne dénie à personne le droit d’avoir envie d’en découdre avec les flics, mais je m’arroge le droit de dire qu’en l’occurrence c’était contre-productif, et même particulièrement con, fournissant un prétexte immédiat à une répression sans doute décidée dès le début, qui fut – qui le nie? – violente, humiliante et indiscriminée (y compris pour ce qui est du saccage du mémorial) Voilà…

    Répondre
    • sknob Auteur

      Merci pour votre commentaire, qui apporte des précisions utiles. Mais ça n’explique pas pourquoi la majorité des personnes qui avaient théoriquement vocation à venir manifester sont restés chez eux (l’objet de mon billet).

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      • Antoine Turgeon

        L’autonomie sociale et l’autonomie politique répondent au « pourquoi » de la présence NÉCESSAIRE des citoyens d’une société lors d’une manifestation.

        Pour pratiquer ces autonomies, les révolutions (je parle ici de changements radicaux [à partir de la RACINE des choses] dans la politique et l’imaginaire collectif d’une population « x ») et la désobéissance civile (refuser d’obéir à une loi plus grande que soi, de façon consciente et délibérée) sont essentielles.

        Pour obtenir la liberté (qui est inassociable au concept du bonheur), il faut des sacrifices et des efforts. C’est pourquoi il est aussi facile de cesser de participer à des manifestations après 30 ans, surtout lorsque des répressions sont planifiés d’avance.

        L’influence qu’a une majorité sur le cours des évènements est plus important que l’anticipation des traitrises, car ils changent les choses à leurs RACINES.

        Répondre

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