No Pasaran. Jamas.
Clément n’aura jamais 20 ans… Cette réflexion m’attriste autant qu’elle m’horrifie. Puissamment. La classe politique et les médias auront beau tenter, un peu tard, d’éteindre le feu qu’ils ont allumé, la mort de Clément est bien un crime politique. Les fascistes ont battu à mort le militant Antifa qu’il était. Ni plus, ni moins. Alors, entendre parler de « récupération politique » rajoute une couche à ma tristesse en la mâtinant de colère.
Posément, hors du tumulte, pouvons-nous nous accorder trois secondes de réflexion ?
Il faudrait que je fasse fi de mon dégoût personnel, de cette compassion inévitable pour la famille et les proches de Clément. Cela aurait pu être un de nos fils, frère, neveu, cousin.
J’ai passé, ce jour-là, la quasi-totalité de ma journée à zapper sur Itélé et BFM avec un sentiment de masochisme intense. J’ai entendu les journalistes, les politiques, les témoins, les fascistes. Comment peut-on être étonné ? Horrifié, bien sûr, mais étonné ? Comment ?
Ces deux chaînes info ont offert, depuis des mois, une couverture médiatique proprement ahurissante à la manif pour tous et tous ses dérivés scabreux ou ridicules. Notre mémoire est encore fraîche de notre colère profonde à l’occasion du rassemblement pour le mariage pour tous, constatant qu’elles suivaient le Vendée Globe sans solution de duplex quand, sur la mer, il ne se passait rien. Rien.
Au lendemain de l’agression meurtrière de Clément, Dominique Rizet sur BFM préférait accorder du crédit aux factieux parlant de « bagarre qui aurait mal tourné » entre deux groupes extrémistes. Pourtant, une multitude de témoignages faisait état de la violence des fascistes, que le ministère de l’Intérieur reconnaissait la forte proximité, pour ne pas dire appartenance aux JNR, Rizet nous servait en boucle la version esseulée du « vigile » qui aurait vu les provocations des Antifa. La belle affaire !
Toute la journée, nous avons eu droit à la désinformation finement orchestrée de Ayoub, leader des JNR. Interview, invitations en plateau. Y a-t-il eu quelqu’un pour le contredire ? Un journaliste, un tant soit peu informé, pour rappeler quelques vérités sur la violence de ce mouvement ? L’utilisation de photos, de vidéos pour mettre à mal l’angélisme de Ayoub ? Non rien. Du tout. Nulle part.
Sur le Net circulaient des documents montrant que, contrairement à ce qu’affirmait le FN, il existait, bien sûr, de fortes accointances entre eux (lire à ce propos le billet de Laurent de Boissieu). Les médias ont-ils relayé ? Non. Nulle part. Ce sont les médias du XXIe siècle…
Politiquement, nous avons eu droit au show habituel du ministre de l’Intérieur. Il paraîtrait qu’il aurait déjà dissous certains de ces groupuscules fascistes. Ah oui ? Heureuse d’apprendre que les Roms ne sont pas sa seule obsession… Jean-Marc Ayrault a agité son petit poing et nous a rassurés. Il allait les « tailler en pièce » ! Quel cirque…
RFI a publié « un inventaire des mouvements d’extrême droite ». Ils en recensent 8. Combien sont interdits, dissous ? Aucun.
Hier, tout le monde était légitimement scandalisé, triste et bien décidé à en découdre. Jusqu’à quand ?
Nous avons interpellé Valls, pendant des mois, pour qu’il se penche sur Civitas. Des suites ? Non. Rien.
Ce projet de loi pour le mariage pour tous a été le ferment de toutes les haines. Nous avons été les spectateurs de ce climat puant. Les témoins des priorités du gouvernement qui, alors que Michel Sapin « recevait » les chômeurs comme des malpropres, la Barjot et son péroxydé de Bongibault se pavanaient dans la cour de l’Élysée. Qui a oublié ? Pas moi.
Christiane Taubira a été la cible de ces homophobes racistes, victime de caricatures immondes, d’insultes impunies. Quelqu’un dans ce gouvernement a-t-il tapé du poing sur la table en disant : « ça suffit, c’est assez maintenant ! » ? Non. Personne.
Depuis Sarkozy et sa puante « droite décomplexée », une parole nauséabonde s’est libérée. Des paroles qui crachent sur les symboles de notre République : Liberté, Égalité, Fraternité.
Alors, ce 5 juin 2013, un enfant est mort et ce n’est la faute de personne. Lors des rassemblements spontanés en hommage à Clément, la droite ne s’est pas mélangée à la gauche. Les socialistes, quand ils n’étaient pas absents, ont été hués. Ça fait chouiner dans les chaumières socialistes et umpistes. Pauvres chouchous…
Mais quand nous ont-ils démontré, depuis 40 ans, qu’ils pouvaient être un rempart au FN ? Quand ? À Henin-Beaumont ? Dans le Vaucluse et dans le Gard en pissant sur le fameux « front républicain » ? En admettant que, finalement, Marine Le Pen est moins hard que son père et que l’on peut « débattre » avec elle parce qu’elle représente un noyau dur de 10% de racistes nationalistes ? En ne la mettant jamais face à ces contradictions, ses mensonges, et l’absolu nawak de ses solutions ?
Depuis combien d’années le FN est l’idiot nécessaire à l’absurde « vote utile » ? Tout ça parce qu’ils se sont retrouvés au 2e tour en 2002 après la campagne calamiteuse de Jospin. Mais ce n’est jamais de leur faute. Jamais.
Comment s’étonner qu’aujourd’hui une partie de la population tienne la droite et la gauche pour responsables de ce climat dégueulasse ? Depuis le 6 mai, tant de gens qui ont voté pour François Hollande ont le sentiment d’être oubliés, niés, méprisés, étouffés, écrasés. Il y a dans ce pays et dans toute l’Europe une montée puissante des nationalismes. En Grèce, en Hongrie, en Norvège.
Mais ne nous y trompons pas, braves gens, le danger en France s’appelle Mélenchon.
Alors oui, les socialistes n’étaient pas les bienvenus à ces rassemblements. Au lieu de chouiner, ils devraient y réfléchir. Être rejeté par la gauche ça mérite qu’on s’interroge non ?
Maintenant nous voulons les preuves, si chères à Jean-Mimi Aplatie, de cette volonté farouche de lutter contre le fascisme grimpant. On attend. Patiemment et avec vigilance.
Ni oubli ni pardon.
Mots-clés : Méric
Très bel article… pour un triste sujet.
A suivre..
Merci beaucoup. C’est en effet à suivre. Ma surveillance et ma vigilance ne baisseront pas.
Ils ne feront rien ou si peu parce que ce qui leur fait peur ce n’est pas un groupuscule de plus à l’extrême droite ce qui leur fait peur c’est l’idée qu’un jour la conscience des peuples soit assez forte pour leur tenir tête et les écraser.
Ni oubli, ni pardon, résistance.-