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Pendant qu'ils ne cherchaient pas d'alternative, nous pensions à un #PlanB.

L’immeuble

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Au rez-de-chaussée, l’agitation était à son comble, frénétique, hystérique. Ça gueulait, ça hurlait, de rage, de peur, de haine, de désespoir, d’indignation. Dans le quartier, on ne parlait plus que des dernières frasques et provocations des uns et des autres, de leurs guéguerres d’égo, et des pleurnicheries, couinements, invectives, insultes, incivilités et autres nuisances qui en découlaient. Pas un jour sans que les titres de la presse locale et les discussions de comptoir leur soient intégralement consacrés.

Au 1er étage, on ne se plaignait pas des voisins du dessous, bien au contraire. Ils focalisaient toute l’attention, ce qui permettait de faire tourner la boutique sans trop susciter de remous. Les temps étaient durs, les affaires marchaient mal, les vieilles recettes ne fonctionnaient plus, ce qui contrariait les locataires du 1er, même s’ils n’en souffraient pas directement. Seul leur orgueil était blessé, car ils ne commandaient plus le respect du voisinage comme autrefois. D’autant plus qu’ils n’étaient plus les seuls maîtres à bord, puisqu’ils devaient désormais composer avec le trio du 2e étage auquel, ivres, ils avaient cédé tellement de prérogatives.

Au 2e étage, on surveillait effectivement les voisins du 1er comme le lait sur le feu, afin de s’assurer qu’ils respectaient scrupuleusement les termes du contrat qu’ils avaient signé sans se faire prier. Les trois locataires du 2e étaient habités par la foi, et ce n’étaient pas des détails insignifiants tels que les aléas du réel qui allaient les détourner de leur mission sacrée, même s’ils avaient parfois dû consentir in extremis à faire des entorses à l’orthodoxie, lorsque contre toute attente, tout avait failli capoter.

Les hackers du 3e étage étaient hilares. Ils n’en revenaient toujours pas. Cela faisait pourtant des décennies qu’ils détroussaient méthodiquement les habitants des étages inférieurs, de manière à la fois trop lente et trop rapide pour que leurs victimes ne s’en aperçoivent. Tout le génie de leur stratagème était là ! Ils se livraient en outre une concurrence féroce entre eux, perfectionnant leurs algorithmes respectifs afin de renforcer leurs positions et faire fructifier leurs gains par l’intermédiaire de manipulations mathématiques aussi hasardeuses qu’ingénieuses, même si ce n’était plus qu’un jeu dans le jeu qui continuerait à les distraire une fois qu’ils auraient siphonné le dernier centime de l’immeuble, puisqu’à ce stade, ils étaient convaincus que les dindons de la farce étaient trop occupés à sauver la face ou à s’entre-déchirer pour se poser les bonnes questions et découvrir le pot aux roses.

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À propos de sknob

Franglophone songwriter, cartoonist, translator, geek, #ronchonchon. VieuxSage, déjà blogueur au XXe siècle, je ne supporte ni l'injustice, ni la mauvaise foi, ni les gens qui réfléchissent avec le cerveau d’autrui, ni les betteraves. En revanche, j'ai un peu le melon depuis que j'ai publié un billet sur le blog de Paul Jorion. Mes camarades m'ont à l'œil.

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