Le mot du jour d’aujourd’hui ? Aujourd’hui ! par Benoit Deschodt
« Au problème qui est posé : est-ce qu’on peut imaginer faire des forages avec de la fracturation hydraulique dans la Drôme à côté du Vercors aujourd’hui ? La réponse est non. » Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture.
« Aujourd’hui, il est exclu d’exploiter des gaz de schiste en France. » Jean-Marc Ayrault, Premier ministre.
Ça va finir par se voir, les gars… Ça va finir par se voir que, de manière plus ou moins pataude, pour ne pas avoir à vous dédire dans quelques mois, lorsque la Question Prioritaire de Constitutionnalité soulevée par Schupebach aura produit ses effets (qui a dit méfaits ?) à savoir la possible abrogation de l’interdiction de la fracturation hydraulique, vous êtes en train de préparer le terrain à grands coup de « aujourd’hui » la reprise des forages en vue de l’exploitation des gaz de schiste à moyen terme.
« Aujourd’hui, il est exclu d’exploiter les gaz de schiste. » Ce qui, une fois traduit donne : « nous excluons temporairement d’exploiter les GS (gaz de schiste) jusqu’à ce qu’on en décide autrement… Et ne nous demandez pas pourquoi, ayez confiance, on fait tout cela pour le bien des lobbys de tous et surtout des générations futures ». Voilà ce qu’il faut entendre derrière cette petite élégance verbale, cette petite particule fine temporelle et temporaire « aujourd’hui ». Autant dire que c’est bien circonscrit dans le temps.
Carottage
Rappelons tout de même que selon un sondage paru pour le Monde en 2012 (un sondage d’opinion, pas géologique) à voir ici et même un sondage pour le Figaro cette année (tu lis ça là), qui Ô misère ! intègre dans son panel des chefs d’entreprises qui n’ont bien entendu que le profit à courte vue en tête, les Français sont de manière écrasante contre la fracturation hydraulique et l’exploitation des GS.
Rappelons aussi que ces mêmes Français, peuple majoritairement composé de bougres de cons et d’un bon paquet de trous de balles, avaient voté contre le traité européen en 2005 (54,68%, une peccadille) et que jusqu’à preuve du contraire, son vote, sa décision souveraine est un avis consultatif pour la représentation nationale, le Gouvernement et la Présidence de la République.
Alors les bougres de cons contre les GS, autant dire qu’aujourd’hui, mais surtout demain, ils vont pas trop la ramener, hein… De toute façon ils ont l’habitude de se faire carotter.
Des médias toujours aussi balèzes
Subsidiairement, ce qui n’a de cesse de me surprendre en tant que journaliste, c’est cette capacité qu’ont les médias (lis ça et puis ça et tiens, encore ça) à passer complètement à côté du sujet, voire à faire passer une vessie bien pleine, pour une lanterne. Partout il est question de sévère recadrage, là, où, si l’on se réfère au sus-cité, il n’y a que des politiques qui se cachent derrière le poisson-pilote Montebourg. Parfois, on se demande si les journalistes entendent ce qu’ils écoutent, voient ce qu’ils regardent, ou lisent ce qu’ils lisent… En tout cas, on est certains qu’ils écrivent ce qu’ils écrivent. Amen.
Mots-clés : Billet Invité
Des « Aujourd’hui » pour des lendemains qui ne chanteront pas !